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Par exemple A.D.Mer (2011,XVI,15)
A.D.Mer
     
Editions A.Pedone

13 rue Soufflot
75005 Paris

indemer@pedone.info
La sentence arbitrale sur la mer de Chine méridionale et le statut des formations insulaires en droit international
A.D.Mer (2018,XXIII,117)
Paru le 01/01/2019
Haritini DIPLA
Professeure émérite de droit international, Université d'Athènes
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Résumé
La Sentence sur la mer de Chine méridionale a le mérite d’apporter, pour la première fois et de manière bien circonstanciée, un nombre d’éclaircissements sur le statut des formations insulaires. Plus particulièrement, concernant les hauts-fonds découvrants (HFD), elle a confirmé la jurisprudence de la Cour internationale de Justice (CIJ) en clarifiant leur statut d’élévations naturelles qui émergent à marée basse. Si les HFD sont situés dans la mer territoriale d’un autre territoire continental ou insulaire, ils sont soumis à la souveraineté de l’Etat côtier et dès lors, la mer territoriale de ce territoire est calculée à partir de ces hauts-fonds. Si les HFD sont situés au-delà de la mer territoriale, ils n’ont pas de zone maritime propre et sont absorbés par le régime des zones dans lesquelles ils se trouvent. Ils ne sont pas susceptibles d’appropriation. Le Tribunal a souligné qu’un Etat ne peut pas modifier au moyen de travaux le caractère naturel d’un HFD dans l’objectif de le transformer en île, se l’approprier et revendiquer à ce titre des zones maritimes.
La Sentence se concentre en grande partie sur la définition et le statut des rochers en vertu du paragraphe 3 de l’article 121 de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer (CNUDM). Selon le Tribunal, les éléments de la définition du rocher s’attachent au caractère naturel d’une élévation qui émerge à marée haute, indépendamment de son épaisseur géologique. Quant aux conditions d’habitabilité et de viabilité économique, auxquelles doit répondre un rocher pour pouvoir engendrer une ZEE / PC, l’interprétation du Tribunal adopte une appréciation « historique » de conditions puisées dans le passé et basées sur le rocher à l’état naturel ; ainsi les critères posés par la Sentence sont si stricts que très peu de « rochers » pourront atteindre ou dépasser la barre placée trop haut par celle-ci. Néanmoins, cette interprétation a été adoptée sans que le Tribunal ait tenu pleinement compte d’une vaste pratique étatique qui ne semble pas correspondre à ses conclusions. A la suite de cette interprétation, le Tribunal a retenu pour toutes les élévations du groupe des Iles Spratley qui émergent à marée haute le caractère de rochers qui, en vertu du paragraphe 3 de l’article 121, ne peuvent pas disposer d’une ZEE / PC.
Malgré l’absence de la Chine et son refus de reconnaître la Sentence, celle-ci garde toute sa valeur intrinsèque obligatoire en vertu de l’article 296 de la CNUDM. Par ailleurs à part leur mission de dire le droit afin que le différend soit résolu, il semble que les Juges du Tribunal ont voulu revêtir la Sentence d’une « aura » plus générale. Or, il faudra attendre son accueil par les Etats et leur pratique à l’avenir ; il sera par ailleurs extrêmement difficile de les voir retirer leurs réclamations existantes, car contraires aux très hauts et nouveaux standards imposés par la Sentence, qui ne lie bien sûr que les parties au différend. En plus, il faudra voir également quel sera l’avenir des demandes des Etats pour un PC au-delà de 200 milles au nom de différents îles/rochers et les protestations éventuelles d’autres Etats devant la Commission des limites du plateau continental (CLPC). Enfin, il faudra attendre si la Sentence est suivie dans ses conclusions par d’autres organes judiciaires, la CIJ, le TIDM et des tribunaux d’arbitrage.
Abstract
For the first time, the South China Sea Award has brought with detailed arguments some clarity to the status of islands. In particular, with regard to low tide elevations, it has confirmed the ICJ’s jurisprudence in bringing more light to the status of naturally features above water at low tide. Where a low tide elevation is situated within the territorial sea of another mainland or island, it falls under the sovereignty of the coastal State, and the territorial sea will be calculated from the low tide elevation. Where a low tide elevation is wholly situated at a distance exceeding the breath of the territorial sea, it will have no maritime zones of its own, is not subject to appropriation and will fall under the regime of the areas in which it is located .The Tribunal has underlined the fact that it is not possible for a State, through constructions, to alter the natural character of a low tide elevation and to transform it into an island under its sovereignty which could generate maritime zones.
The Award deals specifically with the definition of rocks under article 121 par. 3 of UNCLOS. The Tribunal looks into the natural character of a rock; witch is an area of land above water at high tide, independently from its geological features. With regard to the question of human habitation and economic life allowing claims for EEZ and CS, the Tribunal based its decision on historical considerations on the rocks at their natural state. The criteria given by the Award are so strict that very few rocks will be viewed as being entitled to EEZ/CS. Moreover, the Tribunal did not consider the important practice of States. The Spratley islands have fallen under this interpretation and been deprived of such zones.
The Award, despite the non-participation of China into the proceedings and its nonrecognition of the decision, still carries a legal value with a binding force under article 296 of UNCLOS. It seems that the Tribunal wanted to give to this case a special importance. It will be interesting to see how the practice of States will abide by it in the future and how States will deal with existing claims in particular with their submissions for a PC beyond 200 miles. Let us see also whether this Award will be followed by other judicial institutions such as the ICJ, ITLOS and arbitral tribunals.